Avertissement : Ces exercices sont extraits du livre « Homélies et Prises de Parole Publiques – 30 Exercices pour se Perfectionner ». Notre contrat avec l’éditeur ne nous autorise à publier que des exemples. Pour les autres, nous vous invitons à vous reporter au livre.
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Vous trouverez sur cette page des exercices pour…
Savoir d’où vous partez (1)
Structurer votre texte pour l’oral (10, 11 ,12, 13, 14)
Acquérir une expression orale qui touche les coeurs (21, 22, 23, 24, 25, 26, 27)
Faire le point au terme des exercices (29 ,30)
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Homélies – Exercice pour savoir comment mes paroles sont reçues
Ce premier exercice a pour objectif de faire le point sur vos « points forts » en matière de communication (sur lesquels vous devez vous appuyer), et sur ceux qu’il serait souhaitable d’améliorer. C’est un exercice en quatre temps. Prévoyez environ 10 minutes pour l’homélie, 15 minutes pour l’analyse, 10 minutes pour la confrontation avec la vidéo et 5 minutes pour la conclusion, soit un total de 40 minutes par prédicateur.
Exercice 1 – Les points forts et les points améliorables
- Premier temps : l’homélie
Si vous avez choisi de le faire seul, montez votre caméra sur pied et cadrez-la sur l’endroit où vous vous tiendrez. Lorsque vous vous sentirez prêt, déclenchez l’enregistrement vidéo et allez à l’endroit choisi, face à la vidéo. Puis pensez à votre public adulte habituel et prononcez votre dernière homélie, sans rien changer à vos habitudes, en veillant à ne pas dépasser 8 minutes.
Si vous êtes trois confrères, les autres se répartissent aux deux coins de la pièce (pour le travail du regard) et s’astreignent à prendre des notes, non pas sur le fond, mais sur la manière de communiquer. L’un d’eux déclenchera l’enregistrement à votre signal. Chacun, avant de prononcer son homélie, précisera les textes du dimanche concerné et la catégorie de public auquel il s’adresse.
- Deuxième temps : l’analyse.
À la fin de chaque homélie, vient le temps des questions. L’avantage de faire cet exercice à plusieurs et/ou, si possible, avec un ou des amis laïcs, est d’augmenter l’objectivité de l’analyse. Soi-même, on n’est pas toujours bon juge de ses propres performances. De plus dans une assistance les ressentis peuvent être divers. Cependant mieux vaut faire ces exercices seul que de patauger à vie dans l’impéritie. Le simple fait de se concentrer sur « la forme » des homélies (ou de tout exposé public) est en soi un déclencheur d’amélioration.
Mais, attention ! Ici, quatre précautions…
- contrairement à l’habitude, vous ne vous préoccuperez que de la manière de communiquer,
- comme l’objectif est d’augmenter la performance de chacun, vous mettrez de côté le respect humain et la langue de bois, en vous rappelant qu’on ne peut guérir un malade sans diagnostic précis,
- le questionnement se fera en se mettant « dans la peau » d’un auditeur habituel, tel que défini par le prédicateur qui a parlé, sachant l’attention du Seigneur pour les brebis perdues,
- vous éviterez de vous disperser : ne commentez que ce qui concerne la question posée. Parlez chacun à votre tour. Ecoutez-vous, même si vous n’êtes pas d’accord. Si vous parlez de tout ou tous ensemble, vous ne progresserez pas !
Focalisez-vous sur 12 questions :
- Quel est le (les) point(s) fort(s) du prédicateur en matière de communication ?
- Avons-nous tout entendu, y compris la fin des phrases ?
- Un non-spécialiste aurait-il compris l’intégralité des mots ?
- Avons-nous compris toutes les idées exprimées ?
- Avons-nous été intéressés ?
- Y a-t-il eu un moment où nous avons perdu le fil ou pensé à autre chose ?
- Pouvons-nous dire quel était le principal message de cette homélie ?
- Le prédicateur donnait-il l’impression d’y croire ou d’accomplir un devoir ?
- Qu’apporterait cette homélie à des catholiques bien formés ?
- Pourrait-elle aider des personnes en recherche et ignorantes ?
- Intéresserait-elle des jeunes ?
- Qu’est-ce qui vous semble améliorable et pourquoi ?
Attardez-vous particulièrement sur la première et la dernière question.
- Troisième temps : la vidéo-confrontation
Son intérêt est de permettre au prédicateur de confronter son ressenti avec les conseils prodigués par ses complices. Il arrive souvent que lors de l’analyse, le prédicateur estime que les autres exagèrent, puis que devant la vidéo, il s’exclame : « Ah ! Je n’aurais pas cru ! »
- Quatrième temps : le diagnostic
Lorsque chacun se sera exprimé sur une homélie, mettez-vous d’accord sur les points forts et sur ceux qu’il serait souhaitable d’améliorer. Notez-les sur une feuille divisée verticalement en deux colonnes : sur la gauche, les points forts et sur la droite, ceux à améliorer. Cette « Feuille de Progrès » suivra chacun et devra être complétée après chaque exercice.
À la fin de la séance, chaque orateur repartira avec son homélie enregistrée sur une clé USB (pour la réétudier) et sa « Feuille de Progrès » (pour suivre ses progrès et cibler ses efforts).
N’oubliez pas de fixer une date pour les exercices suivants. Un espace de deux semaines laisse le temps du mûrissement.
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Homélies – Exercices pour Captiver les intelligences
L’intérêt suscité par l’accroche doit aussitôt être maintenu par l’introduction qui, comme son nom l’indique, introduit le thème traité et si possible les étapes proposées. Comment mieux décider des amis à vous accompagner dans une belle balade ou un bon restaurant, qu’en les faisant d’avance « saliver » ?
Exercice 10 – Structurez un plan captivant
Certes, l’homélie dominicale peut se limiter à une méditation dépourvue de plan mais les esprits occidentaux risquent de s’y perdre. Ce qui peut convenir aux homélies de semaine, plus courtes, ou à celles prononcées en monastère, sera plus difficile à suivre par les auditeurs hétérogènes des messes dominicales habituelles. La plupart ont besoin de se raccrocher à un plan classique en deux ou trois parties. Par exemple pour l’évangile de l’enfant prodigue, vous pouvez envisager une première partie centrée sur l’attitude de l’enfant, la seconde sur celle du père et la troisième sur celle du frère qui ne comprend pas. Vous pouvez aussi choisir de traiter successivement l’historiette, son sens spirituel, puis les conséquences dans nos vies.
Il ne suffit pas que ce plan existe dans la tête du prédicateur : il doit aussi être indiqué aux auditeurs avant, pendant et après. Dans l’introduction, vous annoncerez clairement que vous allez suivre ces trois parties. Dans la conclusion, vous rappellerez l’idée principale de chacune des parties et proposerez une conclusion générale.
Dans le discours, le plan doit donc être scandé par des silences de degré 5 ainsi que par de petites phrases du type : » nous avons vu ceci, voyons maintenant cela « ou bien » explorons maintenant… » ou encore » après avoir analysé cette scène d’Évangile, voyons en quoi elle nous concerne aujourd’hui « . Le fondu-enchaîné valorise l’orateur mais rend la compréhension et la mémorisation beaucoup plus difficiles pour les auditeurs. Il est donc à proscrire dans la pratique des homélies dominicales habituelles.
Chacune des parties devant être suffisamment nourrie, il faut prévoir en même temps la matière que vous y développerez. C’est l’amplitude de ce développement qui évitera de penser qu’il ne s’agit que de poncifs sempiternellement répétés.
Cet exercice consiste donc pour un dimanche précis, ayant choisi le thème de votre homélie, à définir un plan logique, attrayant et clair.
Exercice 11 – Familiarisez-vous avec les quatre types de formulation
Nous l’avons vu (chapitres I-4 et II-3), une idée importante peut être formulée de quatre manières différentes : affirmative/positive, affirmative/négative, interrogative/positive et interrogative/négative. Nous avons aussi vu que la première manière, celle que nous utilisons le plus souvent par facilité, est celle qui fait le moins réfléchir.
Cet exercice consiste d’abord à choisir une idée essentielle dans l’homélie dominicale (ou l’exposé) préparée dans l’exercice 10, puis à s’entraîner à la formuler successivement selon chacune des quatre manières ci-dessus. Ensuite, vous vous demanderez laquelle de ces formulations a le plus de chance de faire réfléchir vos auditeurs. Recommencez ensuite cet exercice en partant d’une autre idée essentielle.
Si vous choisissez une formulation sous forme d’interrogation, prévoyez évidemment les trente secondes nécessaires pour que vos auditeurs commencent soit à élaborer une réponse, soit à ressentir le besoin d’écouter vos explications (silence de degré 6). Pour que les auditeurs inattentifs ne s’endorment pas, répéter la question plusieurs fois sur un ton différent ou en la formulant autrement.
Exercice 12 – Illustrez votre homélie avec des images fortes
Partant de votre dernière homélie, efforcez-vous de l’animer par des images. Il peut s’agir d’un mot « dérangeant », d’un geste ou d’une historiette.
Pour quel usage ? Essentiellement pour les idées principales. Où les puiser ? Jésus les prenait dans la vie quotidienne, agricole, ménagère et sociétale de ses auditeurs. Vous pouvez aussi vous inspirer de l’actualité et pour les jeunes, de leurs lectures, des derniers tubes ou de ce qui se passe lorsqu’ils oublient de recharger leurs batteries de téléphone. Le Pape François recommande fortement l’utilisation des images qu’il utilise souvent et à bon escient. N’hésitez pas à vous inspirer de ses homélies accessibles sur Internet (Il suffit de taper « youtube homélies du pape françois »).
Lorsque vous avez choisi une image, demandez à un complice s’il la trouve utile et appropriée.
Exercice 13 – Terminez par une activation précise et exemplaire
Son objectif est que les auditeurs n’en restent pas à la théorie ou se contentent passivement que Dieu agisse pour eux. La foi n’étant pas une opinion mais une manière de vivre avec le Christ, vous proposez une application pratique. Pour les varier de dimanche en dimanche, un moyen mnémotechnique consiste à se souvenir qu’elles peuvent concerner l’âme (prière, méditation silencieuse, lectio divina), l’intelligence (lecture individuelle, formations en séances spécialisées ou sur Internet[1]), ou le cœur (attitudes, engagements caritatifs, etc.). Vous expliquerez que celle que vous proposez n’est qu’un modèle et que chacun est libre de choisir une autre activation… Et, pour ne pas paraître moralisateur, vous direz « nous » plutôt que « vous » afin de vous inclure parmi ceux qui sont invités à cette mise en pratique.
L’exercice consiste donc, pour l’homélie des exercices précédents, à élaborer trois activations, une de chacune des catégories ci-dessus, en pensant à un public habituel.
Exercice 14 – Faites une homélie en appliquant les acquis précédents
Choisissez pour un dimanche précis un thème d’homélie et construisez-la en sept sections : successivement une bonne accroche, l’introduction, un plan en deux ou trois parties, la conclusion et une activation pertinente que vous indiquerez sur votre aide-mémoire. Puis reportez les idées principales sur un carton-parachute divisé en sept cases, une pour chaque section.
Soignez particulièrement la première, l’accroche et la dernière, l’activation. Si vous gardez la parabole de l’enfant prodigue, l’accroche peut être une question à choisir parmi la multitude qui peuvent être posées : par exemple, si vous vous adressez à des jeunes, « Qui d’entre nous n’a eu envie, un jour, de quitter ses parents pour voler de ses propres ailes ? » Ou bien « Qui d’entre nous dans une situation de détresse n’a ressenti le besoin de demander l’aide de notre Père ? » Ou encore « Est-ce que nous ne sommes pas un peu comme ce jeune qui prend les cadeaux du Père mais oublie de l’en remercier ? » Etc. Et là, vous ajoutez : « Je vous laisse un peu de temps pour y réfléchir. »
Après la conclusion, vous terminerez en proposant, à titre de modèle, une application pratique pour la semaine. Par exemple : « Pour que cela ne reste pas purement théorique, ne pourrions-nous, chaque soir de cette semaine, prendre quelques minutes de silence pour nous demander si nous avons bien pensé à remercier Dieu pour ses dons ? »
Cet exercice consiste d’abord à écrire les idées essentielles sur un document comportant les sept cases successives, puis à prononcer votre homélie devant la vidéo et si possible un ou deux comparses. Ensuite visionnez l’enregistrement et posez-vous les questions suivantes :
- Mon homélie était-elle claire et facile à comprendre par le public supposé ?
- Était-elle intéressante ?
- L’accroche était-elle attractive ?
- Le plan était-il clair et perceptible par tous ? Y a-t-il eu entre chaque partie, un silence de degré 5 et une annonce ?
- Ai-je illustré les idées principales avec des images fortes et pertinentes ?
- Pour la compréhension comme pour la mémorisation, le plan a-t-il été annoncé et résumé dans la conclusion ?
- La conclusion était-elle dans la ligne définie dans l’introduction ?
- Ai-je terminé par un modèle d’agir chrétien, précis et facile à appliquer ?
……………
Les outils (ou balises) ACCMA ne constituent pas une méthode unique et obligatoire. Telle ou telle recommandation pourra ne pas être utilisée pour certaines homélies. Mais lorsqu’on fait des gammes, il vaut mieux les mettre toutes en pratique. Et ici, vous êtes invité à faire des gammes.
Répétez ces exercices jusqu’à ce qu’ils deviennent quasiment automatiques.
[1] Comme les MOOC du Collège des Bernardins.
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Homélies – Exercices pour Toucher les Cœurs par mon expression orale
Les exercices précédents étaient focalisés sur le choix d’un objectif cognitif ou comportemental précis et sur l’agencement du contenu pour que les esprits suivent et retiennent. Reste à travailler notre expression orale pour toucher les cœurs. Et ils se dirent l’un à l’autre : « Notre cœur ne brûlait-il pas en nous tandis qu’il nous parlait en chemin et nous ouvrait les Ecritures [1]? » Nous avons vu au chapitre II-4, que selon notre façon de faire, aussi bien la voix que le non-verbal peuvent transmettre du positif, du neutre ou du négatif, et donc orienter les auditeurs vers l’adhésion, l’indifférence ou le rejet.
Il ne suffit pas que l’orateur prenne conscience « intellectuellement » de notre peu de chances d’entraîner l’adhésion lorsque notre posture est pontifiante ou excessivement humble, notre regard éteint, notre voix monotone, la gestuelle absente et le visage inexpressif ou infiniment triste… Il faut encore qu’il s’exerce suffisamment pour que les auditeurs perçoivent que ses paroles expriment vraiment sa conviction profonde et qu’il veut leur faire partager la joie de ce qui le fait vivre. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite [2].
Exercice 20 – Que votre posture montre que vous vivez ce que vous dites
Simulez votre déplacement de l’autel à l’ambon ou à l’endroit que vous aurez choisi pour dire votre homélie. Commencez par vous mettre dans la peau des diverses catégories d’auditeurs qui vous écoutent habituellement : personnes âgées ou jeunes, intellectuels ou gens simples. Votre attitude leur donne-t-elle envie de vous aimer et de vous écouter ? Associe-t-elle la dignité du ministre ordonné et la proximité du pasteur ?
Puis recommencez en essayant de faire sentir que vous êtes à la fois un homme parmi eux et celui que Dieu a élu pour cette fonction.
Exercice 21 – Travaillez vos regards
Après avoir relu le chapitre II-4, retravaillez une des homélies dominicales précédentes en prévoyant de regarder le plus souvent possible ceux à qui vous parlez, avec la double idée de leur transmettre votre empathie et de savoir s’ils suivent. Pour ne pas oublier ces regards, dessinez sur votre carton/parachute, un petit œil (•) pour chaque moment stratégique. Puis, prononcez votre homélie devant la vidéo. (Prenez l’habitude lorsque vous consultez votre carton/parachute de le lever à vos yeux plutôt que de baisser la tête)
Lors de l’analyse de l’enregistrement, posez-vous les questions suivantes :
- Est-ce que tous auront eu l’impression d’avoir été regardés ? Ceux du fond, ceux de devant, ceux des côtés et éventuellement, ceux de derrière ?
- Les ai-je regardés vraiment ou mon regard s’est-il perdu dans la contemplation du Saint Esprit ou de la ligne bleue des Vosges ?
- Mon regard pouvait-il paraître sévère ou hautain ou au contraire traduisait-t-il l’amour du pasteur ?
- Les ai-je regardés aux moments-clés : avant de commencer l’homélie, entre chaque partie, durant le silence qui a suivi les questions importantes, avant la conclusion, puis lors de l’activation et à la fin ?
- Ces regards m’ont-ils fait perdre le fil de mes idées ou suis-je revenu à mon homélie facilement ?
Ensuite recommencez votre homélie en essayant de perfectionner tout ce qui vous semble devoir l’être.
Exercice 22 – Rendez le ton et le timbre de votre voix « authentiques »
Nous avons vu au chapitre I-3, que l’oral a sur l’écrit un avantage majeur, celui de pouvoir faire passer sa conviction directement, de cœur à cœur, à condition de s’en donner la peine. Certains orateurs qui s’expriment avec une voix agréable et chaleureuse en privé, montent dans les aigus ou prennent un ton professoral insupportable dès qu’ils prennent la parole en public. Il est normal de modifier votre voix lorsque vous passez d’une conversation privée à une prise de parole publique, ne serait-ce que parce que vous devez articuler davantage et parler plus lentement (chapitre III-2), mais dans tous les cas, votre ton doit rester normal et votre timbre naturel.
Cet exercice consiste à refaire une homélie en appliquant les acquis précédents et en cherchant à garder un ton ni trop grave (car on vous entendrait mal), ni trop aigu (pour ne pas casser les oreilles) et un timbre juste pour que vous soyez ressenti comme « véridique ».
Exercice 23 – Ajustez le débit et la force de votre voix à vos propos
Le débit et la force sont deux variables complémentaires. Le débit doit être suffisamment lent pour que tous aient le temps de comprendre et suffisamment rapide pour que l’attention ne faiblisse pas. La force doit être suffisante pour que tous entendent, notamment les fins de phrases trop souvent escamotées, et non excessive pour ne pas devenir assourdissante et douloureuse.
Surtout, les deux doivent être variés comme le sont les textes et vos propos. L’objectif de ces variations est de faire apparaître les différences, ou encore de mettre en exergue une idée importante, une citation biblique, une interrogation fondamentale. Rien de pire pour l’écoute, la compréhension et la mémorisation, qu’une lecture monocorde. Ce qui peut convenir dans un monastère où les moines sont habitués à la méditation et à la psalmodie, provoquerait inéluctablement le sommeil d’un public confronté quotidiennement à une multitude d’informations, de débats et de scènes filmées avec une grande diversité d’expression orale.
Commencez par lire devant la vidéo les diverses lectures d’un même dimanche en changeant de voix – vitesse et force – pour les phrases importantes ou les paroles du Christ. Puis enchaînez par votre homélie en appliquant les mêmes variations. Pour ne pas les oublier indiquez-les sur votre carton/parachute par des symboles (par exemple, pour augmenter la force, ¯ pour la diminuer). Analysez ensuite l’enregistrement vidéo en vous posant les questions suivantes :
- Entend-on clairement tous mes mots, y compris en fin de phrase ?
- Mon débit est-il suffisamment lent pour que tous comprennent et assez rapide pour que leur attention ne faiblisse pas ?
- Les variations sont-elles suffisantes pour rendre vivants l’Évangile et l’homélie ?
- Les mots et les phrases importants sont-ils bien mis en exergue ?
- Est-ce que l’ensemble est harmonieux et sonne « vrai » ?
N’hésitez pas à répéter souvent cet exercice pour atteindre et surtout pérenniser le résultat espéré.
Cependant entre ces gammes en atelier et la réalité dans une église plus ou moins vaste et trop souvent mal sonorisée, il peut y avoir une grande différence. Rappelez-vous aussi que dans une église bondée, les corps amortissent les sons, à l’inverse de ce qui se passe lorsque l’assistance est réduite : alors il faut parler moins fort et plus lentement. Il faut donc compléter ce travail d’entraînement par une enquête sur place. Le plus simple est de demander à un complice, confrère ou personne de confiance de vous indiquer par un signe convenu comment vous êtes entendu au fond de l’église : par exemple, pouce en haut pour augmenter la force, en bas pour la diminuer, horizontal si elle est parfaite ; abaissement répété de la main vers le bas pour indiquer d’aller moins vite ; geste de rapprochement des deux mains pour vous indiquer de vous rapprocher du micro et l’inverse pour vous en éloigner. Encore faut-il que vous pensiez à le regarder !
Exercice 24 – Par vos intonations, faites ressentir vos sentiments
Cet exercice se subdivise en fait en trois temps. Le premier est fondamental. Pour bien vous convaincre du rôle essentiel des intonations dans l’expression orale, commencez par demander à un ami de vous dire plusieurs fois les mots « Ah vous voilà !« , avec des attitudes d’esprit successivement heureuse de vous voir, indifférente, furieuse et enfin sarcastique. Vous constatez que les mots sont les mêmes, mais que pour celui à qui vous vous adressez, le message transmis est totalement différent.
Le second consiste à faire la même expérience avec la phrase « Nous chrétiens, nous croyons que Jésus est ressuscité ». Déclamez-la successivement avec des tons dubitatif, indifférent et enfin profondément convaincu. Exercez-vous suffisamment pour prendre vraiment conscience du fait que votre intonation peut transmettre et entraîner chez les auditeurs l’indifférence, l’adhésion ou le rejet (chapitre I-7).
Le troisième consiste à prononcer à nouveau une de vos homélies précédentes en accordant une grande attention à vos intonations. Si vous travaillez à plusieurs, demandez l’avis de vos complices, puis confrontez votre ressenti avec leurs avis devant l’enregistrement – vidéo.
Exercice 25 – Apprenez à bien utiliser les silences de degrés 5 et 6
Pourquoi dit-on que « les silences sont porteurs de sens » ? Au chapitre I-4, nous avons vu ces 6 degrés et leur utilité. Les silences de degré 5 ont pour objet de bien marquer les changements de parties : associés à une petite phrase de liaison/rupture, ils facilitent la compréhension, la mémorisation et de là, le positionnement des auditeurs. Les silences de degré 6, après chaque question, leur laissent un temps pour réfléchir. Car ce qui naît de la rumination personnelle est infiniment plus éducatif que ce qui est entendu passivement d’une oreille plus ou moins attentive.
Lorsque Jésus se tait devant la femme surprise en union illégitime, son long silence interroge les fondements, les habitudes, le légal de ceux qui veulent la lapider. Lorsque la réponse vient enfin (Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette le premier la pierre), un nouveau silence s’installe, un silence très long, bien plus fort que toute parole : les certitudes sont bousculées, le regard est changé. Et ceux-là s’en vont, un par un, définitivement transformés.
Sur le carton/parachute d’une des homélies précédentes, tracez des traits de séparation entre les parties (que vous exprimerez par des silences de degrés 5) et prévoyez une ou deux questions suivies de silences de degré 6 que vous indiquerez par un carré. Pour ces derniers, osez tenir entre 15 et 45 secondes. Pour que les auditeurs distraits ne soient pas surpris, prévoyez d’annoncer que vous leur laissez un peu de temps pour cette réflexion ou de répéter plusieurs fois la question de façons différentes. Puis prononcez de nouveau cette homélie devant la vidéo et, en visionnant l’enregistrement, mettez-vous dans la peau d’une personne en recherche ou blessée par l’Église.
Puis répétez cet exercice en vous efforçant d’appliquer les principes travaillés dans les exercices 22 à 24 qui concernaient les sept éléments de la voix.
Exercice 26 – Perfectionnez votre gestuelle
Comme les images et comme les variations vocales, la gestuelle souligne les idées importantes et raccroche l’attention de ceux qui ont mille autres choses en tête. Il ne s’agit pas de gesticuler, mais d’aider à voir et à comprendre par des gestes simples. Les homélies du pape François en sont un très bon exemple. Lorsque vous parlez du Christ, montrez la croix. Quand vous décrivez la foule qui le suit, faites un geste large de la main. Si vous évoquez la résurrection, levez les deux mains vers le ciel. Osez faire des gestes lents et amples qui indiquent votre certitude, au contraire des gestes étriqués qui témoignent d’un manque de confiance, ou pire, des deux mains vissées sur l’ambon qui traduisent la peur. La perception par les auditeurs de ce manque de confiance serait projetée sur le contenu de votre homélie. Rappelez-vous que, vases d’argile, notre force ne vient pas de nous [3].
Cet exercice consiste à prononcer à nouveau une des homélies précédentes en veillant particulièrement à l’accompagner d’une gestuelle adaptée. Visionnez l’enregistrement et recommencez jusqu’à ce que votre gestuelle devienne suffisamment persuasive.
Exercice 27 – Adaptez les expressions de votre visage
On ne peut pas annoncer la certitude d’être sauvé avec une tête d’enterrement [4] ou de professeur. Si vous évoquez la joie, que votre visage soit joyeux. Si vous parlez de tristesse, ayez la tête correspondante. Lorsque vous arrivez à l’ambon, que votre visage exprime l’infini respect pour la Parole que vous allez lire. Mais avant de prononcer votre homélie, regardez le peuple dont vous avez la charge en lui souriant afin qu’il ressente votre empathie.
Commencez par observer attentivement le visage des présentateurs d’informations à la télévision. Admirez comme leurs mimiques collent aux thèmes abordés. Puis prononcez à nouveau une de vos homélies en veillant particulièrement à ajuster les expressions de votre visage au contenu de votre discours.
[1] Lc, 24, 32.
[2] Jn, 15,11
[3] 2 Co. 4, 7.
[4] EG 10
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Homélies – Exercices finals
Savoir où j’en suis dans ma progression
Ces deux derniers exercices ont pour but de vous aider à faire le point, seul moyen de progresser dans la bonne direction. Le premier porte sur la manière de structurer votre homélie pour atteindre les intelligences, le second sur l’expression orale pour atteindre les cœurs. Leurs questions portent sur des détails qui ne sont que des moyens. Même si nous en avons vu l’importance, ils ne doivent pas faire oublier que l’essentiel est que vos auditeurs aient bien entendu et tout compris, que vous les ayez intéressés et qu’ils aient retenu votre message principal pour leur donner le maximum de chances de se positionner dans l’adhésion.
(Extraits de « Homélies et Prises de Parole Publique – 30 exercices pour progresser », Chapitre II, 9)
Pour ces deux derniers exercices, nous vous invitons à refaire une homélie devant la vidéo et si possible devant des complices… C’est à eux que nous destinons ces questions. Si vous ne les posez qu’à vous-même, les réponses risquent d’être subjectives.
Exercice 29 – Le point sur la structuration du contenu
Déterminez bien à quel auditoire vous vous adressez : basique ou intellectuel, adulte ou jeune… Puis mettez-vous dans la peau successivement de catholiques bien formés, de ceux qui savent peu, de ceux qui viennent rarement à la messe, des déçus par l’Église, des personnes en recherche…
- Quel était son objectif ? Est-ce bien celui que l’orateur avait choisi ?
- Le thème était-il pertinent pour cet auditoire ?
- Les mots étaient-ils compréhensibles par tous les auditeurs ?
- L’accroche nous a-t-elle ferrés ? Nous sommes-nous sentis concernés dans nos vies ?
- Le plan était-il clair ? Pouvons- nous le répéter ?
- L’introduction a-t-elle annoncé le thème traité et les différentes étapes du plan ?
- La conclusion répondait-elle aux questions ou problématiques annoncées en introduction ?
- Les changements de parties ont-ils été indiquées par des silences et des annonces ?
- Y a-t-il eu des concepts, dogmes ou règles de vie qui auraient mérité d’être mieux explicités ?
- Y a-t-il eu des digressions inutiles (sources d’alourdissement et de dispersion au détriment du reste) ?
- Quels procédés ont été utilisés pour aider les auditeurs à mémoriser (annonce du plan, répétitions, résumé du parcours, images fortes) ?
- Après la conclusion, des modèles concrets de « mise en pratique » ont-ils été proposés pour la semaine ?
- Avons-nous été intéressés ou notre esprit s’est-il évadé ?
- Au terme, nous sentons-nous enrichis ?
Exercice 30 – Le point sur l’expression orale
Redisons une dernière fois que sa préparation ne peut se faire qu’en dernier, après avoir prié les textes, choisi l’objectif et travaillé la structuration de l’homélie (ou de l’exposé). Si la lampe n’est pas allumée, à quoi servirait le chandelier ?
- Le prédicateur a-t-il suscité l’envie de l’écouter ? (en se référant aux différents auditoires).
- Donnait-il l’impression d’y croire ou d’accomplir un devoir ? Parlait-il uniquement aux intelligences ou aussi aux cœurs?
- Nous a-t-il fait passer sa conviction en regardant chacun de nous ?
- Avons-nous, tous, tout entendu, y compris en fin de phrases ?
- Son timbre était-il naturel ou artificiel, chaleureux ou professoral ?
- Le ton était-il normal ou trop aigu (fatigant) ou trop sourd (difficile à entendre) ?
- La force et le débit de sa voix étaient-ils variés ?
- Les intonations stimulaient-elles l’attention et aidaient-elles la compréhension ?
- Nous a-t-il laissé du temps pour nous approprier ?
- A-t-il posé des questions suivies de silences suffisants pour nous faire réfléchir ?
- Sa gestuelle était-elle attractive et appropriée à son propos ?
- Son visage était-il « muet » ou expressif ?
- Nous a-t-il donné l’envie de revenir l’écouter ?
- Sur quoi doit-il encore faire des efforts ?
Ces deux exercices, n’hésitez pas à les refaire périodiquement. Faire le point, savoir où on en est, reste le meilleur moyen, en mer, sur terre et au ciel, d’avancer dans la bonne direction. Lorsqu’un problème est détecté, il est déjà à moitié résolu.
Un point définitif ? Non ! Nous avons toujours à progresser. Il sera utile de vous poser ces questions périodiquement en les confrontant à l’hétérogénéité de vos auditoires en matière de formation chrétienne.