Petit Manuel de Synodalité
Dominique Barnerias, Luc Forestier, Isabelle Morel – Salvator, 2021 – 15 €
Analyse
Les auteurs présentent les différentes étapes des synodes diocésains : comment les préparer, les célébrer et les recevoir. Le premier obstacle – donc le premier objectif à dépasser – est celui de la passivité des chrétiens quand une paroisse devrait être « une communauté sans cesse en formation, en construction, en croissance » et qu’elle ne devrait jamais « se satisfaire de ceux qui sont déjà là, déjà engagés, mais devrait garder toujours le désir d’aller vers ses propres périphéries. » Sont ensuite développés les moyens à mettre en œuvre au sein des paroisses, puis des congrégations religieuses et de l’Eglise universelle. Dans les paroisses, les auteurs proposent d’organiser : « des assemblées paroissiales annuelles, ou bien ponctuelles pour un projet particulier, à laquelle on invite largement les personnes en mission ainsi que les paroissiens. »
Ce livre montre ensuite que la synodalité est un état d’esprit fondamental pour instaurer une dynamique pastorale participative et active de tous les fidèles, hommes et femmes, ceci dans le respect des positions individuelles, des fonctions ecclésiales et de la doctrine. Douze principes sont à respecter et en premier l’écoute attentive. L’élaboration de toutes les décisions est une tâche synodale, même si en définitive, la décision finale est une responsabilité ministérielle. Par contre au préalable, il faut « laisser du temps à une assemblée de débattre et d’élaborer des solutions qui répondent le mieux possible à la question posée » afin « d’atteindre une unanimité morale qui dépasse les oppositions de départ. »
Ce livre se termine en montrant que cet esprit synodal tire ses racines de l’Ancien et du Nouveau Testaments.
Les Auteurs
Les auteurs sont enseignants au Théologicum de l’Institut Catholique de Paris. Dominique Barnérias est prêtre d’une paroisse d’Île-de-France, Luc Forestier, est prêtre oratorien, directeur de l’IER (Institut supérieur de sciences religieuses) à l’Institut catholique de Paris, Mme Isabelle Morel est auteur de plusieurs livres autour de la catéchèse dans le monde occidental actuel. La préface est de Nathalie Becquart, xavière, secrétaire adjointe au Synode au Vatican.
Commentaire du 5P
On lit souvent le désarroi d’un certain nombre de prêtres devant la démarche synodale et les tendances protestisantes, voire anarchisantes de certains laïcs de bonne volonté qui s’y révèlent. Il est donc rassurant de lire ce livre écrit par des ecclésiastiques qui construisent, heureux, dans cette démarche. A lire par tous les catholiques, en premier par tous ceux qui sont engagés dans des mouvements ecclésiaux.
Un livre aussi offrir à ceux de vos prêtres qui sont désorientés ou inquiets alors que cette démarche permet réellement d’amplifier la communion, la participation et la mission.
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L’Intelligence des Écritures
Marie Noëlle Thabut – Artège éditions, 6 tomes, prix moyen 24€
Analyse
Pour chaque dimanche, dans un langage clair et simple, les quatre textes du lectionnaire sont explorés, analysés et approfondis. Du temps de leur écriture au nôtre, les mots et les préoccupations ont changé : fausses interprétations et anachronismes peuvent aboutir à des contre-sens. Ce travail rejoint la recommandation du Pape François (dans Evangelii Gaudium) : relier l’intention des auteurs dans leurs contextes historiques à ce qui peut être utile aux auditeurs actuels dans leurs contextes différents.
1° M.N. Thabut creuse l’intention des auteurs à la lumière de ce qu’on connait de leurs contextes historiques et intellectuels. 2° Elle replace chaque texte dans la continuité de l’œuvre dont il est extrait, ce qui en éclaire le sens. 3° Elle montre la cohérence symphonique qui unit ces quatre textes. 4° Elle rappelle si besoin, les différents niveaux de lecture et leurs interprétations historiques. 5° Elle termine en en montrant l’actualité dans nos vies actuelles.
« Elle enseigne certes, mais d’une manière tellement vivante et naturelle qu’elle ressemble le plus souvent à une conteuse… Elle va droit aux difficultés… et sait déjouer les pièges… » (Philippe Gruson – Service Biblique Évangile et Vie)
Le commentaire du 5P
Le prédicateur n’y trouvera pas son homélie toute faite, mais les bases de la compréhension du texte à la lumière de l’Histoire et de l’Exégèse. La préparation d’une homélie dominicale comporte plusieurs étapes successives. La première consiste à bien comprendre le texte, sans se préoccuper, à ce stade, de choisir l’objectif de l’homélie et encore moins de travailler la manière de communiquer qui feront l’objet d’étapes ultérieures. Cette lecture, crayon ou surligneur à la main, permet d’éviter les contre-sens, les interprétations hasardeuses et les paraphrases infantilisantes. Ensuite vient le temps de la prière.
Ce livre est aussi un instrument de travail exceptionnel pour les catholiques qui veulent au cours de leur semaine, méditer les textes du prochain dimanche en s’initiant d’une manière facile à la compréhension adulte des différents livres de notre bible.
L’auteure
Laïque, catholique et mère de famille, Marie Noëlle Thabut a étudié la théologie et appris l’hébreu. Depuis des années, elle commente les textes chaque dimanche matin sur des radios chrétiennes et KTO. Alliant sa double expérience biblique et de mère de famille, ses commentaires sont éloignés de tout esprit d’infantilisation. On lui doit plusieurs autres livres, notamment « Aux sources de l’Eglise ».
Note
L’avantage des livres, c’est de permettre un travail personnel, crayon en main, meilleur manière de s’approprier et de construire sa propre réflexion. Mais il est aussi possible de retrouver ces textes par internet sur…
– le site de « L’Eglise catholique en France ». Cliquer sur « Approfondir sa foi » puis sur « Commentaires de Marie Noëlle Thabut »
– le « blog de Thierry Jallas » où les mêmes textes sont déjà surlignés ce qui en rompt la monotonie.
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Selon ta parole – La prédication de Jean Marie Lustiger
Jean-Baptiste Arnaud – Parole et Silence, Paris, 2016 – 615 pages, 32 €
Analyse
Cette thèse explore l’art homilétique de Mgr Aron Jean Marie Lustiger. Ayant fait sienne la recommandation de Lumen Gentium ( Parmi les principales charges des évêques, la prédication de l’Évangile est la première ), doué d’une grande dextérité intellectuelle et d’une profonde connaissance biblique, il s’efforçait de déranger la tranquillité de ses auditeurs pour provoquer l’adhésion au Christ. Concernant la forme, prêchant debout devant l’ambon pour être au plus près de ses auditeurs, il cherchait par sa rhétorique, à provoquer leur réflexion personnelle : « Je vous propose de voir ensemble, de réfléchir ensemble à … »
Les chapitres successifs explorent : la manière d’écouter, de comprendre, de se laisser convertir et d’annoncer ; le rapport entre le Christ et l’Ecriture Sainte ; le rôle de l’Esprit Saint dans la prédication ; la place de la Parole dans la liturgie ; l’enfantement de la communauté par la Parole ; son débouché sur l’amour et l’espérance ; son rôle missionnaire ; son insertion dans la cité et l’histoire actuelles ; son objectif eschatologique.
Faute de pouvoir tout résumer, voici quelques cristaux : « Le prédicateur doit savoir que la parole qu’il transmet dérange autant qu’elle attire. Et en même temps il doit se montrer prudent pour ne pas imposer de fardeau impossible à porter (…) Nous devenons saints parce que le Christ nous saisit et nous pardonne, l’Eglise sainte est composée de pêcheurs (…) Le Christ ne parle pas de l’amour, il aime. Il ne parle pas de la vie, il donne sa vie, il donne la vie (…) Ne pensez pas que votre vie soit comme une quantité fixe qui est en train de s’épuiser (… mais que) chaque instant est un instant rajouté par la grâce de Dieu. »
Le commentaire du 5P
Le prédicateur y trouvera autant sur le fond que sur la forme : la richesse de cette « théologie en acte » se double d’un habile travail de communication, utilisant volontiers une rhétorique en quatre temps : 1° l’accent est mis sur « l’écart entre la parole de Dieu et la vie des auditeurs. » 2° En découle une interrogation ?. 3° Suit un commentaire qui ne répond pas à la question mais entre plus profondément dans l’obscurité de la contradiction pour se laisser saisir par le Christ 4° La conclusion associe action de grâces et envoi en mission.
On peut regretter de ne pas y trouver deux clés de cette richesse : tout un référentiel qui fait du chrétien qui n’y a pas accès, un apprenti aveugle (l’éducation talmudique avec son questionnement permanent, l’herméneutique juive avec ses niveaux de sens, mais aussi la lecture si particulière à cette tradition des lettres et des mots avec l’utilisation de leur signification numérique), mais aussi la conversion de celui qui a voulu que soit inscrit sur son tombeau : « Je suis né juif. (…) Devenu chrétien par la foi et le baptême, je suis demeuré juif comme le demeuraient les Apôtres. »
L’auteur
Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris, licencié en droit privé (Assas), admis au concours externe de l’ENA, J.B. Arnaud est prêtre du diocèse de Paris depuis 2007 et docteur en théologie. Il cumule les fonctions de délégué épiscopal pour les jeunes adultes, coordinateur du parcours EVEN, directeur au Séminaire de Paris, co-directeur du Département de Recherche Politique et Religion au Collège des Bernardins et membre du conseil scientifique de l’Institut Jean-Marie Lustiger
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La joie de prêcher – Petit Manuel
François Xavier Amherdt – Collection Perspectives Pastorales – Editions Saint Augustin, Saint Maurice, Suisse – 288 pages – 22 €
Analyse
Le titre de ce « petit » manuel est d’abord une invitation à ceux pour qui les homélies ou les exposés de foi sont une tâche difficile ou pénible. Après s’être interrogé sur les causes du manque d’intérêt pour la prédication en l’Eglise catholique malgré l’exhortation du S.P. François et l’exemple de sa prédication, il souhaite « fournir à tous les prédicateurs prêtres (évêques), diacres et laïcs, des points de repère pratiques simples, accessibles et concrets. » Seules les prédications « intéressantes » peuvent devenir « une sorte d’accompagnement spirituel collectif« . En dépend « quelque peu la survie de nos paroisses et communautés. »
La première partie propose une réflexion sur l’attitude du prédicateur. On y trouvera des conseils originaux et d’autres plus classiques mais sous un éclairage inhabituel. Elle se termine par une analyse des objectifs de la prédication, avec des tableaux récapitulatifs très clairs comme celui sur les « neuf dimensions et aspects des homélies« .
La seconde contient le noyau pratique de ce guide. : Comment préparer une homélie ? Comment la rédiger ? Et comment la prononcer ? Chaque chapitre se termine par des aide-mémoires très concrets. Pour la préparation, il propose six lectures, successivement spontanée, textuelle, méditative, puis pastorale, christologique et enfin mystagogique et spirituelle. Pour la rédaction, il conseille de donner autant d’importance à la forme qu’au fond. Les jeunes prédicateurs apprécieront particulièrement les 14 propositions de plans différents. Ce chapitre se termine par un échelonnement de l’élaboration réparti sur toute la semaine (ce qui rejoint la méthode du SOH). Enfin pour la prononciation, il liste tous les artifices destinés à rendre le message audible et en phase avec l’intention du prédicateur. A lire et relire, à souligner et surligner, à méditer et appliquer. Signalons la section « Après l’homélie » qui suggère un débriefing personnel à compléter périodiquement par un temps d’évaluation communautaire.
La dernière partie traite des problèmes particuliers comme les grandes fêtes et le mariage. Ce livre se termine par un questionnaire d’évaluation, proposition qu’il faut souligner car trop rare dans l’Eglise Catholique.
Le commentaire du 5P
Ce guide pratique simple sur le fond et la forme, peut sûrement aider le prédicateur débutant ou celui qui veut sortir de la routine, pour lui comme pour ceux dont il a la charge.
On peut regretter qu’il ne comporte aucun chapitre spécifique pour les nombreux prêtres éduqués dans d’autres cultures et d’autres langages qui sont souvent incompréhensibles ou décalés.
L’auteur
Prêtre du diocèse suisse de Sion depuis 34 ans, amoureux de la musique (il a enseigné la guitare au conservatoire cantonal de musique de Sion) et du football (dont il fut arbitre), l’auteur après avoir été vicaire épiscopal et curé de paroisse, enseigne l’homilétique depuis 2004, à Faculté de Théologie de l’Université de Fribourg. Dans le désert des publications catholiques sur cet aspect fondamental de la mission, il fut stimulé par l’attention que lui accordent ses voisins protestants. On lui doit de nombreuses publications et livres sur l’homilétique.
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Et Moi je te dis : Imagine ! – L’art difficile de la prédication
Nicolas Steeves et Gaetano Piccolo – Cerf – 16 €
Analyse
Ce livre associe théorie et pratique. La première moitié approfondit le but de la prédication. Les auteurs partent de quatre constats : 1° Alors que dès leur sortie du séminaire, ils seront confrontés à une assemblée demandeuse de bonnes homélies, « dans la formation des futurs prêtres, beaucoup de temps est consacré aux thèmes et approches rationnelles du discours (…) mais peu à ce qui sera l’activité la plus présente et la plus exigeante de la vie des prêtres : prêcher. » 2° « Si tant de fidèles fuient les assemblées dominicales, c’est parce qu’ils ne supportent plus les homélies creuses et rabâchées sans conviction ». 3° « Désormais éducation scolaires et universitaires plus répandues (…) font que ceux qui sont assis sur les bancs de l’église en savent plus, voir bien plus, sur différents thèmes théoriques et pratiques, que celui qui prêche », même si cette connaissance est fragmentaire. 4° Dans les préoccupations des sociétés actuelles, la sotériologie trouve difficilement place. Il faut reprendre conscience que le but premier de la prédication est le salut des auditeurs et qu’il passe par leur conversion.
Le « comment faire », objet de la deuxième moitié du livre, débute par une réflexion sur les 3 constituants d’une bonne homélie : « une préparation attentive (étude, prière, écoute de la réalité) ; une attention à l’usage des images ; enfin le respect des règles qui s’appliquent à toute communication humaine » (quantité d’informations, qualité du contenu, relation au contexte et clarté). Puis sont approfondis deux moyens insuffisamment utilisés :
– Le bon usage de la rhétorique : Devant affronter des discours contraires, eux-mêmes très persuasifs, l’homélie est « une guerre rhétorique dont l’enjeu est le salut des personnes et des cultures. » On y trouvera notamment un long développement sur les trois moyens de persuasion d’Aristote (l’ethos, le pathos et le logos) et les 5 questions à se poser avant de composer une homélie.
– La création d’images fortes : A l’exemple de Jésus, le prédicateur doit façonner des images nourries d’Évangile à la lumière de la Tradition, et branchées sur le quotidien des auditeurs pour « susciter en eux des réponses concrètes.»
Ce livre se termine par une fiche d’autoévaluation adaptée de celle du SOH suivie d’exemples d’homélies avec autoévaluation.
Le commentaire du 5P
Après un rappel des évolutions de la prédication depuis l’Ancien Testament à nos jours, avec deux arrêts sur les règles formulées par Saint-Augustin dans le premier Manuel d’homilétique et le tournant de Vatican II, les prédicateurs trouveront une réflexion approfondie sur le façonnage d’homélies qui conduisent les auditeurs à une réflexion personnelle après celle-ci. En plus, on en retiendra de jolies perles, comme : « La logorrhée a peu de chances de convaincre l’auditoire, » et «Mind the gap» (Pense au décalage).
Ne considérant que la formation des clercs prêchant dans leur langue d’origine, ce livre n’évoque pas les problématiques des missionnaires « venus d’ailleurs », ni celle des laïcs qui dans de nombreux diocèses sont appelés à accompagner des célébrations ou à transmettre la « Bonne Nouvelle ».
Les auteurs
Nicolas Steeves, jésuite franco-américain, diplômé d’HEC, ayant exercé la profession d’avocat, est titulaire de deux baccalauréats canoniques en philosophie et en théologie, et d’une licence canonique de théologie fondamentale (Rome). Gaetano Piccolo, jésuite italien, est titulaire d’un doctorat en philosophie (Rome). Tous deux enseignent à l’université pontificale grégorienne de Rome. La diversité de leurs cultures aboutit à une rare combinaison des apports en matière de transmission orale.